« Nicolas Sarkozy est dans sa bulle »

Publié le par Un monde d'avance Yvelines

Le socialisme Benoît Hamon estime que la « coupure se creuse entre le président et les Français ». Le porte-parole du PS a par ailleurs « envie d’être candidat » en Ile-de-France aux élections régionales de mars.

Jean Sarkozy a renoncé à présider l’Etablissement public d’aménagement de La Défense : sagesse ou reculade ?
Benoît Hamon. C’est le président de la République, Nicolas Sarkozy, qui est fragilisé parce qu’il donne de plus en plus le sentiment de gouverner pour lui-même.

Le décalage est devenu époustouflant entre son discours sur le travail ou le mérite et le sentiment qu’il exonère les siens de toute forme d’effort et de responsabilité. Le bon sens eût été pourtant de ne pas soutenir la candidature de son fils. Mais Nicolas Sarkozy est dans sa bulle. La coupure se creuse entre lui et la France du quotidien.

Cette affaire laissera-t-elle des traces ?
On a assisté à une opération sauve-qui-peut. La victoire très serrée de David Douillet dans un fief de la droite francilienne a illustré le trouble de l’électorat de droite. La nomination de Jean Sarkozy aurait aggravé la situation. Si Nicolas Sarkozy recule, c’est en raison des sondages et pas, hélas, parce qu’il aurait changé d’avis et de projet pour son fils.

Jean Sarkozy a-t-il, malgré tout, un avenir politique ?
Je note qu’à 23 ans, s’offrir quinze minutes au JT n’est pas donné à tout le monde… Il a manifestement bien intégré les ficelles de la communication politique dans une interview très préparée et probablement répétée. Son avenir dépend sans doute de son propre talent, mais aussi de l’obéissance de l’UMP à son père.

Marie Bové, la fille de José Bové, annoncée comme la tête de liste Europe Ecologie pour les élections régionales en Aquitaine, est aussi une « fille de »…
Marie Bové, ça n’a absolument rien à voir avec Jean Sarkozy ! Elle se présente à l’élection. Tandis que la désignation à l’Epad est un passe-droit. Le parallèle entre eux est un nouveau contre-feu allumé par l’UMP.

Vous avez été très exposé dans les médias lorsque vous vous en êtes pris au ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, et à ses écrits. Avez-vous des regrets ?
Non. Je persiste et je signe. Je reste choqué qu’à l’abri d’un récit littéraire, on puisse banaliser ou justifier le tourisme sexuel. Si on y ajoute la complaisance dont a fait preuve Frédéric Mitterrand à l’égard de Roman Polanski, c’est trop. Je reste fidèle au principe d’égalité : il n’y a pas une justice pour les puissants et une autre pour les faibles. Le seul embarras que j’éprouve aujourd’hui, c’est la concomitance dans le temps entre les déclarations de Marine Le Pen et les miennes. Elle a permis à la droite d’alimenter Une campagne contre moi. Pour autant, cela ne justifie pas que certains aient cherché à en profiter pour régler leurs comptes. Y compris dans ma propre famille politique.

Avez-vous pensé à démissionner ?
Non, jamais. Devant le déchaînement des Besson, BHL, Bertrand ou même, ce qui m’a surpris, Jean-Luc Mélenchon…la seule question que Je me suis posée est la suivante :me suis-je trompé ? Eh bien non. Pour un témoignage de désapprobation, j’en ai reçu dix me donnant raison. Seul Daniel Cohn-Bendit m’a demandé de partir. Mais plus ça va, plus je le trouve à côté de la plaque…

A propos de démission, celle de Martine Aubry a été évoquée par « le Canard enchaîné »…
Cette affaire est une fable. Je la vois toutes les semaines. C’est dur, c’est vrai, car il faut reconstruire le PS, étape après étape. Mais j’ai travaillé dans son cabinet quand elle était ministre de Lionel Jospin et une chose est sûre avec Aubry : dans la bagarre et l’adversité, cette femme ne tombe jamais.

Qu’avez-vous pensé de Ségolène Royal dans son interview diffusée mardi soir sur France 2 ?
Je l’ai trouvée différente, posée. Elle était à son avantage.

L’affaire des expulsés afghans ne démontre-t-elle pas une nouvelle fois que le PS brille par son absence ?
Du démantèlement de la jungle de Calais au retour forcé de ces Afghans, le PS a pris la parole. Le parti est au côté des associations. Il est présent et proteste contre un gouvernement dont la politique d’immigration se résume à maintenir les clandestins dans un état extrême de précarité pour les dissuader de venir. La jungle de Calais, c’est la création du gouvernement qui espère, en plus, faire son beurre électoral sur cette misère. Eric Besson applique les idées du Front national : il met en oeuvre des pans entiers de son programme avec un cynisme indigne.

Etes-vous favorable à une régularisation massive des sans-papiers ?
Je suis favorable à la régularisation des travailleurs sans papiers. Plus globalement, je suis hostile à une politique d’immigration qui se bornerait à servir les besoins en main d’oeuvre de la France. La tradition française d’accueil et de droit d’asile doit être restaurée.

Concernant les élections régionales, ni les Verts ni le PC n’acceptent de s’allier avec vous au premier tour. Cette solitude n’est-elle pas un handicap ?
Le PS ne sera pas seul. Les Radicaux de gauche et les amis de Jean- Pierre Chevènement seront avec nous. Au-delà, je ne renonce pas à rediscuter sans exclusive avec nos partenaires : est-ce aujourd’hui la bonne stratégie pour les différents partis de gauche de partir éparpillés aux régionales face à une droite unie ? Avec les Verts et les communistes, nous avons des bilans communs et nos programmes sont proches. Alors sur quoi allons-nous nous différencier ? Pourquoi courir le risque de se lancer dans une compétition féroce de premier tour ? Il n’est pas trop tard pour se remettre autour d’une table et pour chercher un rassemblement réclamé à cor et à cri par l’électorat de gauche.

L’eurodéputé Vincent Peillon plaide de nouveau pour des accords avec le MoDem au premier tour…
C’est Martine Aubry qui dirige le PS. Elle a fixé un cap : le rassemblement de la gauche. Vincent Peillon est libre de sa parole, mais elle n’engage pas les socialistes.

Serez-vous candidat à ces élections ?
Oui, j’en ai envie. Aux élections européennes, j’ai eu le sentiment d’une confrontation qui s’est déroulée sans que je sois vraiment utile. Cette fois, je veux l’être. Et si je dois être candidat en mars, ce sera en Ile-de-France. J’en discute d’ailleurs avec Jean-Paul Huchon avec lequel je travaille déjà en pleine confiance.


Article du Parisien - Propos recueillis par Eric Hacquemand et Henri Vernet - 25.10.2009

Publié dans Expression

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